Slow Food VS Fast Food, un combat perdu d’avance ?

Si le thème de ce papier est d’emblée annoncé comme un combat du bien contre le mal, c’est pour une bonne raison : à une époque où le pouvoir d’achat perd inévitablement du terrain, où le quidam croule sous les charges et augmentations en tous genres...

Date of the article: 9 February 2023

 

Quelques définitions pour débuter

Si le thème de ce papier est d’emblée annoncé comme un combat du bien contre le mal, c’est pour une bonne raison : à une époque où le pouvoir d’achat perd inévitablement du terrain, où le quidam croule sous les charges et augmentations en tous genres, le budget alloué à la nourriture s’érode, et le fastfood semble être désormais la seule planche de salut pour ceux qui souhaitent encore s’offrir parfois une sortie sociale autour d’une tablée, en famille ou entre amis, les « vrais » restaurants devenant bien trop coûteux pour beaucoup. Or nous savons tous, qu’on se l’avoue ou non, que les fastfood sont mauvais pour la santé, et ne promettent pas vraiment une expérience enrichissante. Leur succès est pourtant flagrant, voire indécent.

Ces 2 types de cuisines sont par essence antinomiques, bien qu’elles puissent attirer des clientèles identiques, dépendant de l’occasion, du moment ou de la compagnie. Si le fastfood est (re)connu comme étant de la nourriture « de masse », souvent vue comme trop grasse, salée et/ou sucrée, bref, mauvaise pour la santé, mais tellement addictive pour certains, la slowfood se veut l’exact opposé, avec des ingrédients tracés, locaux, sans additifs, naturels, et cuisinés à l’ancienne ou avec des méthodes de cuisson modernes qui respectent l’aliment et sa nature intrinsèque. On parle bien ici de « gourmandise » ou de « vraie » cuisine, par de « vrais » chefs ou passionnés, loin très loin de la standardisation et de la banalisation proposée par l’industrie du fastfood, où ce sont d’ailleurs des opérateurs peu qualifiés qui suivent des processus de production semi-automatisés, travaillant des aliments hautement transformés et bourrés de substances dont on parlera le moins possible. Mais nous savons vous et nous que le mauvais a parfois du bon !

 

Et le client dans tout ça ?

Le client se laisse bien sûr guider par son instinct autant que par l’avis de ses pairs sur le world wide web, le marketing souvent astucieux des chaînes, ou ce que le marché lui offre là où il sort ou habite.

Le budget disponible pour l’alimentaire s’amenuisant, beaucoup se tournent, pas dépit, envie ou habitude vers le fastfood, tandis que d’autres dévient volontiers vers sa version édulcorée et plus sexy qu’est le « fast good » pour se donner un semblant de bonne conscience, c’est-à-dire une expérience immersive plus poussée, avec des produits plus léchés et cuisinés, souvent développé à travers des concepts mono-produits dans des décors très aboutis, pour ne pas dire attrayants ! Et franchement, c’est souvent bon et bien envoyé, même si nous y trouvons rarement une bridage formée en école hôtelière.

D’autres sont totalement opposés à cette industrie alimentaire décadente, au jeu qu’en fait le client pour les grandes marques qu’il engraisse inévitablement, et se désintéressent volontairement des grands axes et de leurs marques colorées dégoulinantes, optant pour les centaines de cantines de quartier, néo bistrots, restaurants de poche gourmands, bars trendy ou coffee spots pointus. Et c’est là que nous voyons ce combat quotidien s’opérer. Car ces 2 courants se côtoient en permanence, sans jamais se toucher, et ciblent des clientèles souvent différentes, parfois communes.

 

Où mange-t’on slow et où mange-t’on fast ?

A propos du marché justement. Vous aurez sans nul doute constaté la différence radicale dans le type d’emplacements commerciaux occupés par les fastfood et les restaurants traditionnels. Les premiers tendent à se situer dans les grands centres commerciaux, les artères les plus fréquentées, les centres touristiques, voire les malls, les gares ou les aéroports, tandis que les seconds occupent singulièrement des emplacements plus décentrés, moins passants voire moins grands. C’est un fait.

Et c’est bien que réside la clé de lecture de cet état de fait, car la masse de clientèle touchée par les fastfood, combinée aux marges plantureuses qu’ils génèrent, leur permet d’honorer des niveaux de loyer stratosphériques, en phase avec ce que quantité de grands propriétaires institutionnels ou privés attendent en matière de rendement locatif. Et la boucle est bouclée, d’autant plus que ces propriétaires attendent une sécurité et stabilité, ce que les fastfood offrent de manière certaine. L’écosystème « fastfood » est là, et tient l’équilibre dans un marché pourtant contrasté et difficile pour l’Horeca. Les choses sont ainsi, et jamais vous ne verrez un restaurant gastronomique occuper une place de choix sur une artère commerçante triple A, tout d’abord car la clientèle y cherche un autre type d’expérience que de la gastronomie, mais aussi et avant tout car les marges pratiquées par la restauration traditionnelle sont à cent mille lieues de celles des fastfood, les loyers y étant dès lors intenables.

Cet écosystème existe et tend d’ailleurs à se développer dans tous les grands centres urbains, avec son corollaire réactionnaire qu’est le développement d’enseignes qualitatives mais alternatives dans des quartiers secondaires. Ces offrent répondent à des demandes, tout simplement. Et nul besoin de se plaindre de l’explosion des fastfood, notamment en région bruxelloise, car si leur développement est fulgurant, c’est la clientèle qui s’y rend et en redemande qu’il faut blâmer, pas les marques, dont le seul but est de développer un business model rentable.