A quoi ressemblera le restaurant de 2025 ? Immersion dans les dernières tendances
Quelle directions prendront les restos en 2025 ? Chacun aura son propre avis, mais les tendances ne mentent pas. Voici un bref aperçu d'un possible futur proche. Ca se passe ici...
Date de l'article: 30 Janvier 2025
A quoi ressemblera le restaurant de 2025 ? Immersion dans les dernières tendances
Par Grégory SORGELOOSE 16-01-2025
Nous vous proposons une immersion dans le restaurant de demain. Pas celui d’après-demain, mais celui de demain, celui tenant compte des attentes des nombreux clients qui les fréquentent, quelque peu las de l’expérience qu’ils y vivent pour le moment, fruit des aléas du métier et des challenges toujours plus nombreux qui l’émaillent. Car le restaurant de demain ressemblera fort à une expérience que les plus anciens ont connue avec pour point de mire : le service, l’accueil, l’authenticité, mais dans une version améliorée et technologique. Nous éviterons toutefois soigneusement d’envisager si ce restaurant sera rentable, car la boîte de Pandore qu’ouvre ce débat pourrait en effrayer plus d’un, tout comme nous tairons le développement indécent de la malbouffe et des chaînes en tous genres, qui développent à tours de bras.
Pour envisager le futur, analysons le passé (récent)
Si le travail qu’abattent les nouveaux venus dans la restauration est monumental, et les défis du secteur Horeca colossaux, vous aurez remarqué comme nous que 2024, autant que 2023 qui l’a précédée, marque l’avènement d’une nouvelle génération, ambitieuse en termes de qualité et de sourcing, soucieuse de préserver et mettre en avant le circuit court et le produit fait-maison. La typologie des récentes ouvertures en la matière à Bruxelles, mais plus largement en Belgique, confirme ce constat, avec toutefois quelques différences culturelles toujours marquées entre le Sud et le Nord du pays. A l’instar de la mode, cyclique, les tendances Horeca pointent vers une certaine nostalgie, un retour aux sources, au produit noble et simple, aux méthodes et plus largement à l’accueil. Et c’est un plaisir de le constater. Nous n’en sommes pas pour autant revenus au stade du chariot-dessert, mais ne vous y méprenez pas : il pourrait revenir plus vite que vous ne le pensez !
Et ce nouveau restaurant donc ?
Le restaurant de 2025 se développera sur les mêmes bases, avec quelques crédos supplémentaires ! Ainsi, à l’image du DJ, véritable dieu des nuits, adulé à souhait, le Chef reprend du grade et, aidé par de nombreuses émissions télé autant que capsules vidéo sur les médias sociaux, demeure une star. Il est omniprésent et ultra exposé. Est-il encore réellement en cuisine ? C’est ce qu’on aurait pu lui reprocher ces dernières années, plus occupé à parfaire son image. Mais le chef reviendra en cuisine, car c’est là qu’il excelle. Quant aux cheffes, elles continuent de convaincre autant que leurs homologues testostéronés, malheureusement toujours en moindre nombre, et c’est dommage. La cuisine de terroir locale, belge et française, voire italienne demeure la base de notre alimentation. Si le marché Horeca bruxellois permet de voyager autour du Monde en y testant des dizaines de cuisines exotiques, la base demeure la base, même si elle est hybridée avec des influences étrangères, ce qui la rend d’ailleurs bigrement plus excitante.
Et revenons-en à ce nouveau restaurant…. S’agit-il d’un restaurant ? Ou plutôt d’un bistrot, voire d’un néo-bistrot ? Ou d’un restaurant où l’on pratique la bistronomie, terme tombé (déjà) en désuétude ? Le terme « gastro » en deviendrait presque effrayant et s’adressant à une caste privilégiée. Ou appelons-le nous plus sobrement « table » ? Mais n’oublions pas pour autant le retour en grâce de la Brasserie, quand elle ne s’annonce pas néo-brasserie ! Disons plus globalement que la sémantique autour de ce sujet demeure trouble et mêlée, en cassant finalement les codes classiques, car quantité de concepts ne reçoivent plus aucune étiquette valable. On assiste à une véritable hybridation des concepts, offrant pour les plus ambitieux souvent plusieurs concepts sous le même toit, soit dans une amplitude horaire plus large, allant du petit déjeuner au cocktail, le tout toujours avec brio et jusqu’au-boutisme, soit avec plusieurs univers, rendant l’expérience immersive et totale. Le restaurant de demain ne peut-être catégorisé ou nommé, il se fréquente et se vit, tout simplement.
Partage-t ’on ses plats dans ce nouveau restaurant ?
La mode du sharing-food est à l’image des dark kitchens durant la période covid : une adaptation du secteur à une situation problématique. Le fait de partager de la nourriture, servie dans un total désordre et en petites quantités à tous les convives de la table en a excité plus d’un. On nous y promettait toujours plus d’expérience et de convivialité. Mais d’aucuns en sont revenus, lassés de ne pas trouver de fil conducteur dans cette enfilade de petits plats pas toujours aboutis. Car picorer çà et là, c’est amusant entre amis, une fois tous les 6 du mois, mais ça ne comble aucun estomac ni ne demeure dans les mémoires.
Dans le même registre, on en a marre mais alors marre de se voir systématiquement imposer un menu unique dans tous les restaurants d’un certain niveau ou se voulant d’un certain style. Cela devient la norme, et le restaurant offrant une carte, même courte, l’exception. S’il est bien sûr plus aisé pour un chef de réaliser un menu unique, tant en termes d’achat de denrées que de besoins et de main d’œuvre, le client éprouve une certaine indigestion à toujours se voir imposer son repas, même si la communication qui l’entoure est bienveillante. Dès qu’un plat « à la carte » existe, il est souvent plébiscité, voire adulé. Nous pensons que la carte, à condition d’être courte et du marché, reviendra du néant pour s’imposer bientôt partout comme LE must absolu.
Et pour boire ? Si l’offre sans alcool est désormais un critère essentiel pour certains clients, l’offre de cocktails (avec ou sans alcool d’ailleurs) est devenue le leitmotiv des enseignes food les plus hype du moment. Les solutions pour en servir d’excellents sans devoir embrigader 3 spécialistes ont éclos : premix et batchs, cocktails au fût (sans le côté péjoratif du fût), les solutions existent pour faire rimer régularité et quantité. N’oublions pas le vin pardi, un élément essentiel de nos tables. Quelle que soit sa couleur, n’oubliez jamais à votre carte des vins natures, ils ont convaincu depuis longtemps une frange entière de la population. Mais ne vous limitee exclusivement qu’aux vins natures vous exclura de facto d’une autre frange de clientèle, totalement hermétique à cette mode jugée très boboïste pour des vins comparés à une limonade.
Et le décor ?
Tout le monde a en tête cet adage « less is more », avec en image mentale un décor plutôt sobre et minimaliste fait de tons clairs et de matière douces. Mais la mode change, et si l’on peut encore apprécier à doses homéopathiques ces espaces aseptisés et vaporeux, le décor prend de l’embonpoint et de la couleur, avec l’avènement de la tendance « more is more », dont l’un des plus connus représentants n’est autre que le groupe Big Mamma (et son Barracuda, à Bruxelles) : des décors riches, opulents, soignés, réfléchis, emplis de détails et d’objets, à la limite parfois même de l’indigestion. Impossible de rester passif dans un tel environnement, que l’on peut trouver kitsch ou exagéré, mais il n’en demeure pas moins chaleureux et réconfortant, bref, dans l’air du temps. Et si votre cuisine peut être ouverte sur cet espace, c’est un 10/10 pointé qui vous est promis, car l’expérience passe par le fait de voir le travail du produit sous vos yeux.
Mais comment rentabiliser de tels vaisseaux ?
Nous ne rentrerons pas dans ce débat, car l’on sait à présent qu’un restaurant bondé ne signifie pas qu’il est rentable, alors que tout travail mérite pourtant salaire. Il est évident que l’on est arrivé à la fin d’un système, et il faut penser à créer le suivant, afin d’éviter que ce patrimoine gourmand et roboratif disparaisse au profit de chaînes insipides prônant l’automatisation et l’industrialisation à outrance. Inspirons nous pour cela de la France, où les syndicats professionnels Horeca sont riches en créativité et idées. Un certain Stéphane Manigold (une pointure dans l’Hexagone), président de l’Umih (une association de restaurateurs) y a évoqué, non sans créativité, l’idée d’instaurer un bonus-malus dans le secteur. L’idée y est d’abaisser les charges sociales pour les restaurateurs prônant l’humain et le fait-maison, et de les augmenter pour les entreprises de malbouffe, privilégiant l’automatisation et l’industrialisation à outrance. Et crions le haut et fort : quelle excellente idée, qui permettrait aux artisans de vivre dignement, et aux industriels de vivre sans autre forme de tracasserie particulière, avec tout au plus une marge légèrement rognée, mais pas de quoi pisser dans un violon. Mais nous habitons en Belgique…
Crédit photo : Grégory SORGELOOSE